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Cameroun : enquête sur la concession de Camrail et la braderie de la Regifercam



Alors que le contrat entre l’État camerounais et Camrail (filiale de Bolloré) court jusqu’en 2034, les investissements massifs de l’État pour l’entretien des voies et l’achat des véhicules inquiètent ; face aux investissements quasi-inexistants de l’opérateur et le faible taux de redevances versées aux autorités.


Déjà controversée au départ, la modification du contrat de concession en 2008, avec le gouvernement créera une véritable servitude volontaire de l'Etat, vis-à-vis de la Camrail, filiale camerounaise du Groupe Bolloré qui détient 74,4% du capital à travers la SCCT. Dans la nouvelle concession, la quasi-totalité de l’entretien des voies et du matériel roulant est à la charge de l’État. Le gouvernement sera ainsi forcé de garantir un financement de 193 millions de dollars (106, 047 milliards FCFA) pour un nouveau programme de renouvellement d'infrastructure jusqu'en 2020; qui serait partiellement financé par l'introduction d'un RIRIF194 payable par le concessionnaire au gouvernement dans un compte géré par le concessionnaire.


Le concessionnaire s'engage alors à financer pour 290 millions de dollars (159 , 34 milliards FCFA) des investissements liés au matériel roulant jusqu'en 2020. Une participation jusqu'aujourd’hui flous.


Au-delà de tout, la concession a été portée à 30 ans à partir de l’an 20. Les frais de concession fixes et variables ont été plafonnés à 4,4 millions de dollars US (2, 41 milliards FCFA) annuels dans le cadre d'un droit de concession fixe.


Sur les investissements, les réalisations visibles demeurent celles réalisées avec les fonds publics ou les prêts accordés par les bailleurs de fonds garantis par l’État du Cameroun ; et avec Camrail comme maître d’ouvrage. Ainsi, l'on apprend que dans le cadre du programme quinquennal de renouvellement des infrastructures, agréé entre l'État et Camrail, 13 ponts ont été réceptionnés récemment. « Avec le concours de la Banque Mondiale, CAMRAIL a ainsi organisé, pour le compte de l’Etat du Cameroun, la réhabilitation de douze ponts métalliques sur le Transcam 2 (Yaoundé-Ngaoundéré) et celle du pont ferroviaire d’Edéa sur le Transcam 1 (Douala- Yaoundé) », peut-on lire dans un communiqué Camail signé en 2020.


« Dans le cadre du programme de modernisation des infrastructures ferroviaires, 68 ponts ont été réhabilités pour un coût global de 4,11 milliards de FCFA. 330 km de voie (Ka’a-Belabo, Batchenga et Ka’a, entrées et sorties Douala-Yaoundé) ont par ailleurs déjà été renouvelés. 500 km ont fait l’objet de travaux de confortement et 1 671 ouvrages hydrauliques ont été réhabilités de 2000 à 2020 », selon des documents de la compagnie. Le Ministère des Transports a également lancé en février 2020, les travaux de réhabilitation de 55 autres ponts ferroviaires (ponts métalliques et ponts dalles en béton armé) , sur l’ensemble du réseau.


Le choix de Comazar


Au terme de la procédure en vue de la signature de la concession en 1999, le gouvernement avait accordé la concession SAGA/SDV et Syntra, une filiale des chemins de fer français(SNCF), mais avait exigé qu’elles utilisent le sud-africain Comazar comme opérateur plutôt que Syntra ce qui a été appliqué. Mais Bolloré négociera un partenariat avec Comazar et les deux entités deviendront majoritaires dans la Société camerounaise des Chemins de fer(SCCF). La SCCF détenait à son tour 85% de Camrail, le gestionnaire et l'exploitant actuel de la concession, tandis que le gouvernement et les employés possédaient le reste. En 1998, Comazar était contrôlée à 65% par Transnet, l’entreprise publique sud-africaine de transport qui comprend Spoornet, le chemin de fer principal du pays. Comazar a participé activement dans des concessions ferroviaires, y compris l’exploitation des chemins de fer en République Démocratique du Congo pour une courte période, et des projets ferroviaires en Tanzanie, au Mozambique et au Brésil.


Le cynisme de Bolloré face aux victimes d'Eseka


Alors que le tribunal correctionnel d'Eseka venait de condamner Camrail à une très faible amende de 500 000 FCFA pour activité dangereuse et homicide involontaire, Me Olivier Baratelli l'avocat personnel de Vincent Bolloré s'opposait à l'introduction des demandes chiffrées des parties civiles. L’avocat demandait au juge de ne pas recevoir les constitutions des parties civiles et les mémoires à cet effet, car selon lui, cela s’oppose à l’alinéa 04 de l’article 385 du code de procédure pénale. Une disposition qui exige que « la déclaration de constitution de partie civile doit, à peine d’irrecevabilité, être faite avant la clôture des débats ». Dans un monologue d'une quarantaine de minutes, Me Baratelli précise que les avocats auraient dû déposer « leurs déclarations de constitution chiffrés à temps ». Avant de marteler que : « le droit se fait en cabinet et dans les salles d'audience et non sur les réseaux sociaux » et que « les avocats avaient eu 17 audiences pour déposer les constitutions avec les montants chiffrés », déclare Olivier Baratelli. Une situation qui plongera des centaines de personnes dans une indigence absolue.

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