Technologie et marché du travail : 19 millions d’emplois créés contre 9 millions supprimés d’ici 2030 (WEF)

L’essor des nouvelles technologies bouleverse le marché mondial du travail. Selon le Forum économique mondial, cet impact devrait s’accentuer d’ici la fin de l’année, avec des millions d’opportunités de création d’emplois, mais aussi des suppressions massives attendues.
Le marché mondial du travail devrait connaître une transformation majeure d’ici 2030, avec la création de 170 millions de nouveaux emplois et la destruction de 92 millions, soit une croissance nette de 78 millions d’emplois (en hausse de 7%). C’est ce qu’indique le Forum économique mondial (WEF) dans son « Future of Jobs Report 2025 », qui présente la technologie comme le principal moteur de cette transformation en créant et en supprimant plus d’emplois que toute autre macro-tendance.

Trois tendances technologiques majeures à l’origine de ces mutations
Au total, le rapport prévoit que la technologie crée 19 millions de nouveaux emplois, mais provoque dans le même temps la suppression de 9 millions d’emplois. Les auteurs mettent en avant trois grandes tendances technologiques pour expliquer ce bouleversement, en l’occurrence l’élargissement de l’accès numérique, les progrès en intelligence artificielle (IA) et traitement de l’information, ainsi que le développement des systèmes robotiques et autonomes.
Parmi ces tendances, l’élargissement de l’accès numérique, qui favorise une inclusion économique plus large, constitue une opportunité cruciale pour les populations jusque-là marginalisées. En parallèle, les progrès en IA et en traitement de l’information devraient avoir l’impact le plus significatif sur l’emploi, avec 11 millions d’emplois créés et 9 millions supprimés. L’automatisation des tâches, l’analyse des données et l’optimisation des processus sont les principaux vecteurs de cette dynamique. En revanche, les systèmes robotiques et autonomes devraient être les plus grands destructeurs nets d’emplois, avec une perte nette estimée à 5 millions d’emplois. Ces systèmes automatisés remplacent progressivement les tâches manuelles et routinières, notamment dans les secteurs de l’industrie et de la logistique.
Les interactions entre l’homme et la machine sur le marché du travail évoluent
Selon le WEF, les interactions entre les humains, les machines et les algorithmes redéfinissent les rôles professionnels dans de nombreux secteurs. L’automatisation est en passe de modifier radicalement les modes de travail en réduisant la part des tâches effectuées exclusivement par des humains. Si l’on en croit la répartition actuelle, 47 % des tâches sont réalisées uniquement par des humains, 22 % par des technologies (machines et algorithmes) et 30 % par une combinaison des deux.
D’ici 2030, les employeurs prévoient un rééquilibrage presque égal entre ces trois catégories. La diminution de la part des tâches humaines sera principalement due à une automatisation accrue, qui représentera 82 % de cette réduction, tandis que 19 % proviendront d’une collaboration renforcée entre humains et machines.

Adapter les compétences aux emplois de demain
Si ces prévisions du WEF ne sont que des estimations, elles mettent en lumière l’urgence pour les gouvernements et les entreprises d’accélérer les efforts pour s’adapter aux transitions en cours sur le marché du travail depuis quelques années. Parmi les principaux défis qu’ils devront relever figurent l’investissement accru dans la formation continue, l’amélioration des compétences et l’éducation. Une prévision du rapport, qui semble aller dans le même sens que d’autres études précédentes, indique que près de 60 % de la main-d’œuvre mondiale devra être formée ou reconvertie pour s’adapter aux différentes mutations d’ici 2030.
L’Afrique, qui dispose d’une population jeune et en forte croissance, pourrait tirer parti de cette révolution technologique si elle investit massivement dans le développement des compétences numériques. En 2021 déjà, Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement (BAD), avait lancé un avertissement sur ce sujet lors du Nobel Prize Dialogue organisé par l’Université de Pretoria. Le dirigeant avait notamment indiqué que le continent doit transformer son marché du travail pour s’adapter à l’avènement de la quatrième révolution industrielle, afin d’éviter une grande crise du chômage avec seulement 100 millions de personnes employées sur 450 millions en 2030.
« Le problème est que nous ne créerons pas suffisamment d'emplois pour eux si nous ne changeons pas radicalement les choses […]. Nous sommes à l'ère de la quatrième révolution industrielle et nous devons comprendre que les temps changent, l'intelligence artificielle et la robotique devenant très importantes », expliquait-il, selon des propos relayés par Agence Ecofin.

La technologie redessine les contours du marché du travail mondial. Si elle promet des opportunités importantes avec la création de millions d’emplois, elle exige une anticipation réelle pour minimiser les destructions d’emplois et préparer les travailleurs aux compétences de demain. L’Afrique, en particulier, doit saisir cette opportunité et investir massivement dans la formation de sa jeunesse pour éviter une crise majeure, car comme l’indiquait le président de la BAD, « les emplois du futur nécessitent des compétences du futur ».
Louis-Nino Kansoun
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