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Bataille médiatique sino-étasunienne en Afrique: lorsque le nombre ne signifie pas résultat


Si les Etats-Unis en particulier, et l’Occident politique de façon générale, s’inquiètent ardemment de la puissance géoéconomique et géopolitique de Pékin sur le continent africain, un autre domaine auquel l’Empire du Milieu attache aujourd’hui de l’importance fait lui aussi trembler les élites occidentales.


Si le paysage médiatique africain était jusqu’à encore récemment dominé par les médias mainstream occidentaux et leurs partenaires locaux, quel que soit le type de médias d’ailleurs: télévision, radio, presse écrite, aujourd’hui on assiste réellement à une révolution dans ce secteur. En effet, les Africains, jeunes et moins jeunes, s’intéressent avec grande attention aux informations des médias dits alternatifs, étrangers comme africains, dont la ligne éditoriale inquiète fortement les intérêts de l’Occident.


Pourtant les moyens financiers sont incomparables. Face aux principaux médias étasuniens, britanniques, français, allemands et autres, les projets médiatiques des pays BRICS et des médias panafricains ont nettement un poids financier inférieur. Mais malgré cette évidence, l’Occident politico-médiatique continue de perdre des points. Pour quelle raison?


Eh bien la réponse est assez surprenante. A l’instar d’une perte de confiance massive des populations des pays occidentaux vis-à-vis des médias les plus puissants appartenant à leur «monde», au sein des sociétés africaines le rejet parait encore plus important. Et vraisemblablement, cela est loin d’être dû au simple fait du passé colonial et néocolonial des pays d’origine des médias mainstream, mais surtout à la façon que ces structures médiatiques avaient pris l’habitude de traiter l’information.


Pour exemple, les nombreuses campagnes médiatiques hostiles aux projets chinois sur le continent africain n’ont non seulement pas apporter le résultat souhaité par les commanditaires des dites campagnes, mais ont au contraire renforcé les sympathies de nombreux citoyens africains vis-à-vis de Pékin. Et ce, pas tellement par «amour» envers l’Empire du Milieu, mais plutôt en raison d’une part d’un rejet des méthodes occidentales sur le continent, de l’autre une volonté d’avoir une alternative digne de ce nom parmi les partenaires extracontinentaux, enfin et cela est tout aussi important il s’agit vraisemblablement d’une ferme volonté de l’écrasante majorité d’Africains de pouvoir faire le choix, sans interférence extérieure, de leurs partenaires.


Au fil des années écoulées, Pékin n’a pas adopté un simple rôle d’observateur. Si dans un premier temps, la Chine se contentait de réaliser ses innombrables projets de partenariat avec les pays africains, lui ayant permis de devenir aujourd’hui tout simplement le principal partenaire économico-commercial de l’Afrique avec un volume d’échange de 200 milliards de dollars, depuis un temps plus récent elle a décidé d’imposer sa présence médiatique, tout en restant fidèle à sa philosophie.


Mis à part le lancement en 2012 du bureau africain de la chaine internationale chinoise CGTN dans la capitale kenyane Nairobi, et d’un travail de plus en plus orienté sur l’Afrique de ses agences de presse, notamment Xinhua, Pékin a aussi beaucoup misé sur l’enseignement destiné aux jeunes africains. Ainsi, chaque année près d’un millier de journalistes originaires de divers pays d’Afrique suivent des programmes de formation en terre chinoise http://www.slate.fr/story/180855/afrique-chine-renforcement-presence-mediatique-numerique


Ce n’est évidemment pas tout car Pékin investit aussi dans nombre de médias locaux, principalement dans les pays où la présence de ses intérêts économico-commerciaux est la plus importante. De façon plus générale, la Chine a pleinement accepté le défi de ceux qui dès le départ souhaitaient lui mettre des bâtons dans les roues dans son expansion géoéconomique. Le tout à un moment où l’opposition nette et évidente entre les partisans d’un monde multipolaire devenu réalité et ceux qui désirent un retour à l’ordre unipolaire post-guerre froide rentre chaque jour un peu plus dans sa phase active. Et à ce titre, le domaine des médias n’y échappe pas. Bien qu’il faille garder à l’esprit que face aux CNN, Bloomberg, CNBC ou encore Voice of America, pour ne citer que ceux-là, sans oublier les instruments médiatiques des autres pays occidentaux, les projets médiatiques chinois en Afrique restent en nombres nettement inférieurs. Tout comme du point de vue des budgets alloués.


Mais ce que les USA et plus globalement parlant l’Occident politique n’arrivent (toujours) pas à réaliser, c’est que dans le monde contemporain les grands moyens, notamment financiers, ne suffisent plus pour imposer sa donne. A l’heure d’une information pouvant être obtenue à grande vitesse, et via différents instruments, les peuples du monde deviennent eux-mêmes des analystes potentiels. Et c’est justement dans ce cadre analytique que tout se joue. En ce sens, les sociétés africaines ont non seulement aucun retard quant aux prétendus pays «développés», mais sur nombre de points sont même en avance. Cela est dû peut-être au fait qu’à force d’être la visée d’un grand nombre d’intérêts, les Africains comprennent aujourd’hui toutes les potentialités et les atouts que possède leur continent. Et qu’à partir de cette réalité, vient ensuite la partie analytique et comparative des partenaires – certains jurant d’apporter «liberté, justice et démocratie» sous le couvercle de prétendues valeurs «universelles», le tout avec un agenda qui diffère fortement des intentions annoncées. De l’autre ceux qui évitent de donner des leçons et tout en pensant évidemment à leurs propres intérêts, apportent des projets qui donnent un certain sens au mot «développement».


Aujourd’hui, il ne suffit plus d’avoir le plus grand budget militaire pour avoir les armes les plus sophistiquées. Et dans la nouvelle réalité mondiale, le domaine médiatique le confirme pleinement aussi. Les capacités budgétaires allouées aux campagnes médiatiques ne sont plus vraiment en mesure de voiler des pratiques allant à l’encontre des belles paroles prononcées. Et à ce titre, Pékin a une nette longueur d’avance sur Washington et consorts.




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