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ANALYSE - La propagation des idées fausses sur la Turquie, une tradition dans les médias occidentaux


Les médias occidentaux perpétuent la tradition antagoniste à l'égard de la Turquie, comme en témoigne le livre du Norvégien, Knut Hamsun, rédigé en 1889.

Il y a 130 ans, suite à sa visite d’Istanbul, Knut Hamsun, célèbre prix Nobel norvégien, avait rédigé un livre dont le contenu met en lumière les origines de l'attitude biaisée actuelle des médias occidentaux envers la Turquie. Un élément de comparaison dont l’analyse ne peut s’effectuer sans examiner en amont la situation actuelle.


Au cours des dernières années, le nombre d'articles et de chroniques anti-Turquie publiés dans les médias occidentaux a considérablement augmenté. Lorsque ces reportages et commentaires font l'objet d'une analyse discursive, il est constaté un manque évident d'informations précises. De plus, il est inévitable d'être confronté à un préjugé troublant qui est toujours présent dans ces écrits. Et la combinaison du manque d'informations précises et des préjugés donne naissance à des écrits qui sont presque aussi obsessionnels que les campagnes de diffamation. Dans la plupart d'entre eux, il y a une approche unilatérale imprégnée de subjectivité. Des journaux aux chaînes de télévision, des agences de presse au journalisme sur Internet, il existe en circulation une littérature similaire sur l'exclusion et le catalogage.


La triste vérité, c'est que ce genre de publications jouit d'un large public dans le monde occidental ainsi qu'à l'échelle mondiale (particulièrement en raison de la prévalence de l'anglais). Les cercles anti-Turquie génèrent et reproduisent ces contenus soigneusement élaborés afin de créer une base pour leurs politiques. Et les contenus sans acheteur sont là simplement pour nuire à la réputation.


Les médias en général et le contenu de l'information en particulier ne sont pas indépendants de la politique étrangère générale des pays, ni même de leurs efforts pour étendre leur influence et de leurs attentes pour en tirer profit idéologiquement. Cela étant, le lien entre les dynamiques éthiques fondamentales qui constituent la théorie du journalisme et les textes produits est complètement rompu.


"Il est difficile de connaître la vérité. Ceci est probablement dû à la ‘monophonie’ de la presse européenne, dont le devoir est de nous dire la vérité. Franchement, on se méfie un peu. Le parti qui a besoin d'être entendu est complètement muet", écrit Knut Hamsun il y a 130 ans pour décrire la "forte allergie" des médias occidentaux à la Turquie. Ses paroles sont d'une importance vitale car elles reconnaissent une vérité. Ces déclarations démontrent à quel point la propagande noire des médias européens contre l'État turc et les Turcs remonte loin dans le temps. Ce qui est encore plus troublant, c'est que la réalité exprimée par Hamsun il y a 130 ans met en avant le fait qu'il s'agit maintenant d'un problème aggravé malgré tous les progrès technologiques dans le domaine de l'accès à l'information exacte, et que toutes sortes de désinformation peuvent encore être facilement intégrées aux reportages des médias.


L'étonnement de Knut Hamsun devant le contraste frappant entre les idées qu'il avait tirées des journaux européens sur l'État ottoman ainsi que le sultan Abdulhamid II, et les réalités qu'il a vues de ses propres yeux en venant à Istanbul en est un témoignage majeur.


Ainsi dans les paragraphes suivants, sera développé son témoignage et donné des exemples de la manière dont l'habitude de diffamation des médias européens est réellement ancienne, et à quel point elle est déconnectée des réalités sur le terrain.


- La presse européenne ne tolère pas la diversité:


Knut Hamsun, lauréat du prix Nobel de littérature en 1920, consacre un chapitre de son livre "Vies en lutte" (Stridende Liv) à ses récits personnels d'Istanbul. L'auteur a appelé ce chapitre du livre "Sous le Croissant". Il traite des personnes et des événements que l'auteur a vus pendant son séjour à Istanbul en 1889 - à l'époque du règne d'Abdulhamid II - et de ses impressions sur la ville.


Dans cette section du livre, Hamsun évalue, de son propre point de vue, le style de vie, la structure et la dynamique sociale d'Istanbul, ainsi que divers indicateurs concernant la forme du gouvernement. Malgré les phrases orientalistes typiques qu'il entremêle dans ses écrits (issues de ses préjugés acquis antérieurement), il n'hésite pas à faire des remarques courageuses, montrant qu'il a changé d'avis et qu'il a été étonné par ce qu'il a vu dans les nombreux endroits qu'il a visités. Dans un passage qui révèle l'étonnement qu'il ressent avant même de fouler le sol, Hamsun écrit : "Ce que nous voyons est très différent de ce que nous avons pensé jusqu'ici. Ou ne sommes-nous pas en Turquie? Depuis trente ans, je lis des articles sur un pays ‘au bord de la faillite à cause de sultans incompétents’. La vérité, c'est que notre ferry fait maintenant son chemin dans un pays de contes avec ses petites villes remplies de vergers et de jardins qui nous éblouissent", montrant ainsi que le vrai Istanbul qu’il découvre était très différent des descriptions d'Istanbul produites par les journaux européens.


En plusieurs endroits de son livre, Hamsun souligne également qu'il y a une grande différence entre le sultan Abdulhamid II, et l’image qu’il s’en était faite à partir de ce qu'il avait lu dans les journaux européens et le sultan Abdulhamid II qu'il avait lui-même vu et appris à connaître à Istanbul. Constatant que les magazines en Europe avaient, depuis tant d'années, créé l'image d'un sultan déshumanisé et que les articles non conformes aux jugements européens stéréotypés sur le sultan étaient trop peu nombreux, Hamsun propose une nouvelle série de représentations basées sur ses propres observations dans plusieurs parties du livre.


Il écrit: "Le sultan a pris soin de développer le commerce dans le pays, il ne s'est pas opposé aux réformes dans les écoles, il a permis la construction des chemins de fer et a réorganisé son armée. On dit que c'est un homme très travailleur, qui se réveille à 5 heures du matin et ordonne à ses commis de passer leurs nuits au palais pour qu'ils puissent répondre immédiatement à ses appels en cas d'urgence." Des différences qui témoignent d'une campagne de diffamation menée systématiquement dans les médias européens.


La description que fait Hamsun du sultan Abdulhamid, faisant entre-temps référence au général Wallace (Ambassadeur américain en Turquie de 1881 à 1885), à Sidney Whitman (écrivain britannique) et à Pierre Loti (écrivain et officier de marine française), qui connaissaient très bien Istanbul, est également importante pour comprendre la différence entre réalité et fiction. Les lignes suivantes de Hamsun, où il dit : "Aucun monarque européen n'accueillerait ses invités plus respectueusement, plus poliment ; il a fait plus d'efforts pour éclairer son peuple que ses prédécesseurs et mérite donc d'être loué", révèlent également que le contenu présenté comme réel était effectivement fictif.


Ces lignes qui témoignent de l'histoire, sont - en référence encore à Hamsun - "des gouttes dans l'océan de la publication".


- Toujours prêt à produire un 'autre':


La position stratégique de la Turquie dans l'équation Est-Ouest et sa direction du mouvement dans le cours de l'histoire, qui a surtout fait preuve de continuité, n'est sans doute pas quelque chose de nouveau ; cela se poursuit depuis l'époque seldjoukide et ottomane. L'intérêt de l'auteur le montre aussi. La Turquie a donc toujours occupé une position critique dans l'esprit, d'abord des Européens, puis des Américains, qui sont apparus sur la scène de l'histoire beaucoup plus tard. L'Anatolie a toujours été suivie de près par l'opinion publique occidentale ; ce fut le cas aussi bien au plus fort de son pouvoir que lorsqu'elle montrait des signes d'affaiblissement.


Un fait qui est resté constant, cependant, est que l'attitude dominante dans les médias - l'instrument principal de formation de l'opinion publique - a été négative. Dès l'apparition des premiers journaux en Occident au XVIIe siècle en tant que supports de diffusion de contenu, l'Empire ottoman ou la Turquie sont immédiatement qualifiés d'"autres" dans les articles et les commentaires. L'augmentation de la diversité des outils médiatiques au cours de l'histoire, avec l'arrivée sur le marché de supports de plus en plus perfectionnés, s'est traduite par la simple duplication, en quantité abondante, des mêmes points de vue dans une plus large mesure au lieu d'introduire un changement et un équilibre dans les contenus.


La version la plus récente de cette attitude négative peut être retrouvée dans les reportages sur les réfugiés utilisés contre la Turquie, alors que le pays a accueilli quelque quatre millions de réfugiés syriens et a permis de sauver des millions de vies syriennes grâce à sa politique de "porte ouverte". Les pays des médias occidentaux qui publient de tels articles partiaux n'ont rien fait pour résoudre ce problème sur le plan politique et ils ne font pratiquement rien pour protéger les réfugiés. En tant que tels, ceux dont la seule source d'information est les médias voient leurs opinions sur la Turquie entachées et façonnées négativement.


Ce fait demeuré inchangé pendant un certain temps signifie également que les récits personnels de Hamsun sur Istanbul et le sultan ottoman sont toujours d’actualité, même s'ils ont été rapportés il y a exactement 130 ans. Cela montre malheureusement très clairement que la perception que l'Europe a de la Turquie a toujours été imprégnée de préjugés similaires. Les médias occidentaux poursuivent leur tradition antagoniste à l’égard de la Turquie. Finalement, rien n'a changé depuis 1889.

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